La prise en soin pluridisciplinaire « se caractérise à la fois par une alternance des rôles de chaque intervenant, et leur nécessaire réflexion conjointe » (Herzog, 2004, cité par Chapuis et al., 2015).
Au centre de compétences d’Amiens, cette équipe pluridisciplinaire implique le chirurgien, le psychologue, l’orthodontiste, l’ORL, l’orthophoniste, l’infirmière, et le pédiatre généticien.
Le travail en pluridisciplinarité a pour objectif d’optimiser la prise en soin et de s’enrichir mutuellement des compétences de chacun.
Chirurgie
Si les méthodes chirurgicales peuvent différer, les buts sont identiques. Chaque structure anatomique atteinte (lèvres, nez, palais, maxillaire) possède une fonction qu’il faut préserver sans altérer celle des autres : phonation, éruption dentaire, audition, croissance faciale, ventilation nasale.
Le but recherché dans la chirurgie des FLP est d’obtenir un meilleur fonctionnement de la lèvre et du palais, qui seront par la suite indispensables au bon développement de la face et de la phonation.
Au CHU d’Amiens, la prise en soin des FLP commence dès l’éventuel diagnostic anténatal. Ce dernier est suivi d’une rencontre pré-chirurgicale et d’un entretien psychologique.
À la naissance, le diagnostic de la fente est confirmé cliniquement, et le chirurgien présente aux parents le plan de traitement de leur enfant. La préparation à l’intervention chirurgicale se fait en parallèle de l’entretien psychologique. Des consultations sont proposées tous les quinze jours, afin de soutenir les parents et de leur apporter davantage d’explications. Il est nécessaire qu’une relation de confiance s’établisse entre les parents et l’équipe médicale.
Le premier temps chirurgical a lieu lorsque l’enfant atteint 5kg ou bien 5 ou 6 mois. Il consiste en une chéiloplastie et une véloplastie intravélaire, et est suivi par un entretien psychologique post-opératoire. À la suite de la chéiloplastie, le chirurgien posera des conformateurs narinaires à l’enfant afin que les narines ne s’aplatissent après la reconstruction du nez. Il faudra éviter le plus possible que le bébé porte ses mains à la bouche pour ne pas abîmer la cicatrice.
Entre 18 et 24 mois, le chirurgien procède à la fermeture du palais osseux, et le chirurgien ORL met en place des aérateurs trans-tympaniques si l’enfant est sujet aux otites séro-muqueuses. L’étanchéité entre la cavité buccale et les fosses nasales est désormais acquise.
Dans le cas des fentes alvéolaires, d’autres interventions peuvent être nécessaires, telles que le comblement de la fente alvéolaire par une greffe osseuse.
En outre, deux interventions chirurgicales supplémentaires peuvent être envisagées :
- la vélopharyngoplastie est proposée en cas d’insuffisance vélaire (vers l’âge de 5-6 ans) ; cette opération consiste à associer le recul du voile du palais à la pharyngoplastie afin de corriger la rhinolalie. Elle a lieu lorsque la rééducation orthophonique se montre inefficace, ce n’est donc pas une opération automatique.
- la rhinoplastie est une opération qui peut être demandée par le patient, lorsqu’il a fini sa croissance (à partir de 18 ans) dans le but de rectifier les défauts de la cloison ostéo-cartilagineuse du nez.
Suivi psychologique
Les consultations psychologiques peuvent débuter par une rencontre dès l’annonce du diagnostic. Elles s’effectuent ensuite de façon systématique : en péri-natal, post-natal, ou chez des patients plus âgés qui n’ont pas encore rencontré la psychologue du service. Quelle que soit l’atteinte faciale, un rendez-vous est prévu avant chaque chirurgie.
Suivi en orthopédie dento-faciale
Le rôle de l’orthopédie néonatale est de repositionner les deux berges de l’os alvéolaire, grâce aux orthèses palatines, facilitant ainsi le geste du chirurgien. Pour ce faire, une empreinte du palais de l’enfant est réalisée à la naissance dans le but de fabriquer une plaque thermoformée. Elle évite l’interposition de la langue dans la fente en lui offrant la possibilité de prendre des appuis normaux, mais permet aussi la croissance des maxillaires, l’orientation des fragments, et facilite l’alimentation.
Lorsque l’enfant atteint 4 ans ½, il est reçu par l’orthodontiste du service pour un bilan pré-chirurgical. Ce bilan consiste en la préparation à la greffe osseuse par plaque à vérin et/ou quadhélix.
L’orthopédie dento-faciale est prescrite pour presque tous les enfants porteurs de fente alvéolaire. Le plus souvent, les enfants consultent pour des agénésies dentaires, des dents surnuméraires, des anomalies de formes (riziformes) ou de position (au niveau du palais, ou de l’incisive latérale). Dans le cas de fentes alvéolaires, les enfants présentent des défauts de continuité des berges, une communication bucco-nasale ou une endo-alvéolie du petit fragment (la mâchoire du haut est trop étroite et ne s’insère plus dans la mâchoire inférieure lors de la fermeture buccale). D’autre part, quand il existe une fente palatine, on retrouve souvent des anomalies squelettiques et un hypo-développement du maxillaire supérieur avec une variation importante de croissance selon les calendriers opératoires.
Il est important d’insister sur la nécessité d’une hygiène dentaire précoce.
Suivi en oto-rhino-laryngologie (ORL)
Le suivi ORL consiste en :
- un premier bilan lorsque l’enfant atteint 12 mois, durant lequel un examen clinique et un contrôle audiométrique sont réalisés ;
- un second bilan ORL, systématique avant le deuxième temps opératoire.
En raison du risque élevé d’otite séro-muqueuse chez ces patients, des contrôles réguliers des tympans sont réalisés et peuvent aboutir à la pose éventuelle d’aérateurs trans-tympaniques (en général lors du deuxième temps de fermeture). Il est donc important de considérer cette prise en soin ORL dans le tableau général de l’enfant porteur de fente.
Suivi en génétique
Dans l’équipe pluridisciplinaire, le généticien se charge d’établir des données concernant l’environnement génétique du patient porteur de fente. Généralement, pour une fente non syndromique, il n’est pas rare de retrouver d’autres personnes porteuses de fente dans l’entourage familial direct de l’enfant. À l’heure actuelle, il n’existe pas de marqueurs génétiques des fentes, sauf dans les syndromes particuliers. Cependant, le caractère familial de cette malformation existe et peut se transmettre génétiquement.